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Atelier Caminel : vers un renouveau du prêt-à-porter haut de gamme français


Cocorico ! La France est connue et reconnue pour la qualité de ses ateliers de confection haut de gamme. On peut d’ailleurs se targuer de recenser, parmi les meilleurs tailleurs, bottiers et chemisiers d’Europe, voire du monde ! De nos jours, le prestigieux sésame du « Made in France » serait-il réservé aux grandes maisons de luxe et à leurs clients les plus exclusifs ? Géraud Caminel et son épouse, Tianhong, nous prouvent que non ! Et de bien belle manière.



L’atelier Caminel est aujourd’hui le seul atelier à fabriquer entièrement en France du prêt-à-porter pour homme et pour femme en reprenant tous les codes de la qualité du « bespoke » et de la « haute-couture » à un prix raisonnable.
 
Tout commence en 2017 quand Géraud et Tianhong Caminel décident de changer de vie. Lui quitte la boutique du tailleur où il était chef d’atelier et elle, l’atelier de haute-couture d’une grande maison parisienne.
 
Ils quittent la Capitale avec un rêve un peu fou : monter une marque entièrement fabriquée en France, dans leur propre atelier. De fait, tous deux ont l’expérience et la connaissance technique nécessaire. Ils sont à même de maîtriser toutes les étapes de la fabrication sans aucun problème. Il n’y a plus qu’à trouver où poser ses valises…
 
Les vents les mènent à s'installent à Caussade dans le Tarn-et-Garonne. Certes, la ville est plus connue pour sa chapellerie d’exception que pour ses ateliers de couture, mais c’est l’endroit où Géraud, enfant, dessinait les robes pour les poupées de sa sœur. Petite madeleine de Proust quand tu nous tiens.  

Pour découvrir l’Atelier Caminel, il faut traverser une allée bordée de peupliers. Un grand panneau peint de la main de Géraud lui-même vous indique l’entrée. Le portail passé, vous traversez un immense jardin rempli de fleurs et un potager qui font l'orgueil du couple !
 
Attention ! Vous risquez fort d’être accueilli par le service de sécurité de l’atelier : deux petites filles et un chat très bavard qui vous accompagnent en riant et en miaulant. Au bout du jardin, en face de la maison, Géraud et Tianhong vous attendent en haut des marches.
 
Dans l’atelier, l’ambiance est beaucoup moins bucolique qu’à l’extérieur ; cela ressemble plus à celle d’une brigade : les machines à coudre professionnelles sont au garde-à-vous et fonctionnent à plein régime. Les couturiers et couturières sont tous à l’ouvrage. On découpe, on assemble et on repasse sous l'œil expert des Caminel. L’effervescence règne : la collection doit bientôt paraître !
 
Il faut dire que cette première collection est le fruit de trois ans d’un travail acharné : il a fallu faire venir les bonnes machines, former le personnel, sourcer toutes les matières premières, dessiner les patrons, réaliser les prototypes, les essayer et les corriger... Tout a été pensé, dans les moindres détails.

Car ici, même les tissus sont « Made in France » ! Alors que Tianhong Caminel soupèse les draps pour m’en montrer la qualité, Géraud Caminel me confie d’un air entendu qu’il a eu à cœur de sourcer des tissus majoritairement français : « ça me paraissait une évidence, de ne sélectionner que des tissus fabriqués avec la même exigence que la nôtre » me dit-il.
 
Cette exigence pourrait à elle seule résumer l’atelier Caminel. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la précision des broderies et des dentelles de la collection féminine. Pour les hommes, les puristes apprécieront la finesse des montages d’épaules, faites à la main. C’est la technique des tailleurs ! Une technique habituellement réservée au sur-mesure.
 
Alors que je lui en fait la remarque, Géraud Caminel me répond avec un sourire nonchalant que « ce sont ces techniques artisanales qui font la différence. Il faut les distiller dans les vêtements. Si ce n’est visible que des passionnés, en revanche, en les portant, tout le monde sent la différence ! C’est ça, la vraie qualité ».
 
Il faut dire que Géraud Caminel connaît sur le bout des doigts les méthodes de l’artisanat tailleur. Lui qui voulut d’abord être luthier s’est finalement dirigé vers la mode et se distinguera à Esimode Toulouse dont il sortira diplômé de modélisme en 2014.

Cette formation va s’avérer cruciale : le modélisme est l’art d’imaginer et de tracer un vêtement. Le modéliste, à la différence du styliste, réalise un vêtement fonctionnel sur un corps et maîtrise parfaitement tous les moyens de sa réalisation en industrie.
 
A ce titre, le premier cours de modélisme sera une révélation pour Géraud : « j’ai passé l’heure de cours à sourire. Je comprenais que c’était ce que j’avais vraiment envie de faire. Normalement, on ne sourit pas à l’école, non ? ». Son diplôme en poche lui permettra de débuter chez un tailleur à Paris.
 
Durant presque quatre ans, Géraud Caminel s’occupera de la réalisation de quelque deux milles costumes ! Cette expérience sera le terreau fertile de sa réflexion : comment doivent tomber des manches, quel drapé donner à une poitrine, comment faire rouler un revers... Tout en se remémorant ses années de formation, Géraud pose sur la table de coupe de l’atelier de vieux manuels écornés.

« Depuis que j’ai fondé l’atelier, je travaille ça, dans mes moments de détente » ; ça, c’est une collection de manuels de coupe tailleur qui s’étend de 1890 à 2014. C’est probablement la raison pour laquelle l’Atelier Caminel est un atelier d’exception et Géraud Caminel un tailleur hors du commun. Ce dernier m’explique que sa vraie passion, c’est l’étude du tracé et de la découpe des vêtements. Il me montre alors de nombreuses vestes et gilets, tout droit sortis du début du XXème siècle.
 
Ici, une veste oubliée, d’un confort inédit, pourtant très cintrée, au montage d’épaule spécialement étudié pour la chasse. J’essaie. Je lève les bras, la veste ne bouge pas d’un iota. Là, un gilet long avec des poches plaquées. Le gilet est en whipcord, un tissu très résistant, utilisé pour l’équitation et les uniformes de l’armée dans le temps. Un sentiment de douce chaleur m’envahit. Le gilet est doublé de cachemire à poils longs.
 
« C’est précisément ce vêtement qui m’a donné envie de créer mon atelier. Je voulais un vêtement élégant mais discret pour aller me promener en montagne : les gilets de Décathlon n’étaient pas à mon goût ! Je cherchais quelque chose de raffiné  mais qui n’attire pas le regard. Alors, j’ai décidé de faire le mien. Je l’ai coupé à partir d’une méthode de 1930 que j’ai un peu transformée ».

Et Géraud Caminel de poursuivre : « j’y ai mis des poches plaquées pour y ranger plein de choses et l’ai doublé d’un cachemire pour me tenir bien au chaud. Pourtant, personne ne se retourne sur mon passage ! C’est ce que je veux pour mes vêtements : les plus belles pièces possibles, fabriquées dans les règles de l’art, avec des matières nobles. Mais par-dessus tout, des vêtements faciles à porter : je veux imaginer des vêtements qui diffuseront à tous le plaisir du confort et de la beauté. Je veux concevoir des vêtements adaptés à la vie moderne mais qui portent en eux tout l’art des tailleurs ».
 
Non content d’exhumer du passé des techniques artisanales françaises oubliées, pour « se détendre », Géraud Caminel accepte parfois de réaliser des pièces pour des particuliers mais « sur liste d’attente et si le projet me plaît » me précise-il. Bref, il fait ce qui l’intéresse.
 
Actuellement, le projet qui plaît à Géraud Caminel est une robe de chambre de la Belle Époque qu’un client lui demande de reproduire. Il me montre avec beaucoup d’amusement l’évolution des patrons successifs. Il commente ensuite toutes les modifications qu’il fera pour produire un modèle fidèle à la tradition tailleur.

L’autre pièce qu’il a récemment réalisée est une veste de son invention appelée la Carmagnole. Il m’explique que la Carmagnole était une veste courte portée par les révolutionnaires en France. Peut-être que sa version Atelier Caminel serait un compagnon de route idéal pour mener la révolution du prêt-à-porter en France ?
 
Cette veste est sans doute ce que les compagnons appelleraient un « chef d'œuvre » ; la démonstration d’un savoir-faire. Plus concrètement, la Carmagnole de l’Atelier Caminel est une veste droite à quatre boutons et trois poches.
 
Pour l'œil non averti, ce vêtement ressemblerait à un genre de saharienne un peu fantaisiste. Le passionné y verra un hommage aux regrettés tailleurs de la rue de Sèvres, par la forme emboitante du col, la régularité des passepoils contrastés, l’embu et l’aplomb de l’épaule napolitaine, la finesse des plis creux des poches et du dos… Une veste à la technique parfaite et au confort irréprochable.

Mais ce qui occupe le plus clair du temps de Géraud et de Tianhong, c’est la création de leur ligne de prêt-à-porter, avec un objectif clair. Fabriquer entièrement et transmettre l’amour de leur métier à travers les vêtements les plus aboutis, pour homme comme pour femme. Des vêtements nourris d’artisanats et de tradition mais confortables et décontractés.
    
In fine, la collection de l’Atelier Caminel est une lettre d’amour à la couture française et à l’art tailleur. À ce sujet, Géraud est intarissable. Il décrit avec passion l’anatomie de ses manches comme un chef étoilé décrirait sa façon de préparer son plat signature.
 
Il faut l’entendre raconter avec gourmandise comment il travaille la tête de manche au fer, mais sans trop d’embu pour gagner en confort, sans transiger sur l’élégance.
 
Avec une certaine flamme dans les yeux, Géraud explique : « bien sûr, tout cela est absent du prêt-à-porter classique, pour des raisons évidentes de coûts. Et puis je trouve le prêt-à-porter, même dit « haut de gamme », trop souvent aseptisé, on a parfois du mal à faire la différence entre une marque et une autre… Je ne veux pas faire ça. On est en France, on fait des vêtements pour qu’ils soient beaux ! ».
 
Quel programme ! Et l’homme d’ajouter avec un naturel désarmant : « et puis aussi, parce que c’est beaucoup plus drôle ! ». Pour découvrir l’Atelier Caminel.
 
Raphaël Sagodira
 
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Montres-de-luxe.com | Publié le 23 Octobre 2021 | Lu 2668 fois


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