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Drouot : un régulateur Lépine de la fin du 18ème siècle vendu le 7 juin dernier


La maison de ventes aux enchères Drouot a vendu le 7 juin dernier, un régulateur de parquet astronomique avec calendrier et signes astrologiques, une équation du temps et mécanisme de sonnerie, le tout dans une caisse en bois vernis ; un ensemble signé « Lépine Place des Victoires No. 12 » mais aussi, sur la partie inférieure du nom de l'émailleur « Dubuisson ».



L’ensemble est finement sculptée de motifs d'époque Louis XVI avec trois faces vitrées, en forme de gaine surmontée d'une corniche ornée de dents, le socle de forme cubique, la partie au centre vitrée laisse apparaître le balancier compensé avec sa lentille.

Ce dernier porte l'indication de la température avec une plaque sur laquelle est inscrite la mention utilisée par les grands horlogers de l'époque, à savoir : « elementa suis protrus armis victa » (les éléments vaincus par leurs armes).
 
On remarque un cadran en émail blanc avec des chiffres romains pour les heures et arabes pour les minutes, une minuterie perlée, le pourtour avec les signes astraux des mois de l'année et la fonction du calendrier complet sur 28, 30 et 31 jours, une aiguille avec un Soleil pour l'indication de l'équation du temps, une autre aiguille en acier bleuie pour le calendrier.
 
Cet ensemble est signé « Lépine Place des Victoires No. 12 » mais aussi, sur la partie inférieure, du nom de l'émailleur « Dubuisson ».
 
Le mouvement est doté d’un système de remontage à poids et balancier compensé, d’un mécanisme de sonnerie sur timbre, d’un ressort moteur fixe dans un barillet visible avec une corde, d’une trotteuse centrale battant la seconde, d’un échappement à ancre, typique de Lépine, d’un système de remontoir d'égalité avec un poids, d’un balancier compensé tiges oblongues acier et laiton, d’une suspension couteau avec son contre-poids en laiton, signature sur la platine « Lepine à Paris ».
 
Ce régulateur est intéressant puisqu'il fait penser aux fabrications de l'horloger Raguet qui s'associe à la fin du 18e siècle avec l'horloger Jean-Antoine Lépine et signe ses créations le plus souvent, sous le nom de « Lépine » comme ici, avec signature sur le cadran.
 
Pierre-Claude Raguet, très bon façonnier, dit « Lépine », est né fils d'un marchand drapier à Dôle en 1753 et vient à Paris travailler dans la maison Lépine.
 
Il épouse Pauline, fille de Jean-Antoine Lépine en 1782 et achète en 1783 le tiers des parts de l'entreprise de son beau-père. Il fournit de nombreuses pendules au comte de Provence et aux filles de Louis XVI, Mesdames, pour le château de Bellevue.
 
« Raguet-Lépine », qui signe toutes ses réalisations « Lépine » prend la relève en 1784 en payant son beau-père une rente viagère annuelle de 4000 francs à partir de 1796.
 
D'après les historiens, il a probablement commencé à numéroter ses pendules et régulateurs à partir de 4000 et selon Jean-Dominique Augarde, toutes les réalisations signées « Lépine Place des Victoires » comme ce modèle lui sont attribuées, cet exemple portant le No. 4513 sur la platine signée « Lépine à Paris » - (Les Ouvriers du Temps, Genève, 1996, p. 355).
 
« Raguet – Lépine » traversera avec succès la Révolution et, en 1793, fut nommé membre du jury pour discuter du nouveau système de temps décimal qui fut instauré sous la Révolution française et jusqu'au milieu de l'Empire.
 
Sa remarquable transition sous le régime de l'Empire fut confirmée lorsqu'il fut nommé en 1805, Horloger breveté de Sa Majesté l'Impératrice-Reine.
 
Sous le premier empire, « Lépine » avait parmi ses illustres clients, Napoléon Ier, l'impératrice Joséphine et Charles IV d'Espagne.

Le cadran émail blanc de ce régulateur est signé de l'un des deux plus illustres émailleurs de la fin du 18e siècle, Henri-François Dubuisson qui travailla aussi avec d'autres grands horlogers comme Robin qui est l'origine de réalisations en beaucoup de points similaires à cette pièce.
 
L'un des émailleurs les plus doués de son époque, Henri-François Dubuisson a été décrit par un contemporain comme « ayant la plus grande habileté dans son art, [et] est possédé d'un savoir qui assure la réussite des pièces les plus difficiles ; c'est un véritable service à tous les amateurs pour les faire connaître cet artiste moderne et travailleur ».
 
En 1769, Dubuisson fut admis à la Corporation des Verriers, Fayanciers, Emailleurs et Patenôtriers. Il a beaucoup travaillé pour plusieurs fondeurs de bronze et a produit des cadrans d'horloge en émail pour divers horlogers. À la fin de sa vie, un collègue écrivait à son sujet : « J'ai aimé M. Dubuisson comme artiste, avant d'avoir appris à l'apprécier comme un bon père, un bon ami et un bon citoyen. Il mérite le respect en tous points ».
 
Ce régulateur d'une grande sobriété par son exécution de la caisse mais aussi, d'une extrême complexité horlogère, témoigne en tout point de cet âge d'or de la fin du siècle des Lumières qui reste l'apogée de l'art horloger en France.
 
H. 206 cm - L. 53 cm - P. 30 cm

Montres-de-luxe.com | Publié le Lundi 17 Juin 2024 | Lu 2088 fois