
Auparavant, les problèmes liés à l’étanchéité en milieu subaquatique n’avaient pas été résolus avec suffisamment d’efficience pour que les montres mécaniques puissent accompagner en toute sécurité les amateurs de fonds marins.
Expression ultime de la montre sportive, la montre de plongée vient rappeler que l’horlogerie technique n’est pas uniquement caractérisée par la complexité de ses mécanismes, mais qu’elle se doit d’être également à la pointe en matière d’habillage.
Et dans ce domaine, la montre de plongée a toujours permis aux marques de démontrer l’étendue de leur savoir-faire et leur capacité à produire des garde-temps d’une fiabilité extrême. En effet ces instruments mécaniques utilisés en plongée résistent à des pressions phénoménales et affichent une résistance –notamment aux chocs– exceptionnelle.
C’est dans ce contexte particulièrement concurrentiel que Vulcain signe une nouvelle avancée technique spectaculaire en 1961. Avec la présentation de la Cricket Nautical, la manufacture chaux-de-fonnière démontre sa capacité à associer deux performances à priori antinomiques : réaliser à partir d’un boîtier parfaitement étanche une montre-alarme clairement audible sous l’eau.
L’étanchéité étant par nature associée au caractère hermétique d’un objet, parvenir à diffuser un son de l’intérieur à l’extérieur de ce même objet était jusque-là considéré comme un défi irréaliste ! Répondant par ses caractéristiques techniques aux exigences de sécurité des plongeurs, ce modèle est issu de la mise en commun de diverses compétences : celles de trois experts auxquels les constructeurs de Vulcain ont choisi de s’associer pour développer la première montre de plongée munie d’une alarme audible sous l’eau.

La première contrainte a été de concevoir un instrument capable d’informer le porteur que sa période de plongée touchait à sa fin et qu’il était temps pour lui de rejoindre la surface. Le fameux calibre 120 Cricket offrait cette fonction d’alarme. Restait à trouver un moyen de diffuser efficacement le son sous l’eau.
Pour ce faire, les ingénieurs de Vulcain développèrent un boîtier de 42 mm de diamètre. Une taille aujourd’hui largement répandue mais qui cassait les codes de l’époque ! Les montres-bracelets affichaient des diamètres plutôt proches de 30 mm ! La vérité est que cette dimension imposante fut à l’époque un frein au succès commercial de ce produit.
Doté d’un triple fond nécessaire à assurer à la fois l’étanchéité et faire chambre de résonance, le boîtier était réalisé en acier amagnétique spécialement conçu afin de protéger l’ensemble des traitements rigoureux infligés par l’eau de mer. Grâce à ce boîtier totalement novateur, le timbre résonnait si puissamment que les plongeurs pouvaient s’entendre au-delà de leur champ d’acuité visuelle.
La seconde contrainte fixée dans le cahier des charges consistait à afficher clairement les temps d’arrêt aux paliers de décompression. D’ordinaire les marques utilisaient une lunette tournante pour remplir cette fonction. Vulcain prend alors une direction inédite en remplaçant cette lunette par deux cadrans superposés. Ce qui mérite quelques explications…

La question de l’étanchéité fut également réglée… En lieu et place du verre minéral traditionnel, Vulcain a utilisé le fameux hésalite, une matière plastique nouvelle pour l’époque, particulièrement résistante et parfaitement ajustable.
Autre problématique liée à l’eau, l’usure précoce des matières et en particulier le cuir. Pour éviter la perte de la montre par la rupture d’un bracelet devenu cassant, Vulcain choisit d’utiliser du caoutchouc plutôt que du cuir. Là encore la marque se distinguait par une approche inédite et trouvait en même temps un moyen d’accélérer le
séchage de l’ensemble.
Grâce à ces innovations techniques, la Cricket Nautical portée par Hannes Keller atteint sans dommages une profondeur proche de 250 mètres le 3 novembre 1966 à Toulon. Dans la chambre à haute pression se trouvait également le célèbre Commandant Cousteau, qui pu ainsi confirmer ce nouveau record de plongée où la pression atteignait environ 22 kg/cm2.
D’ailleurs, la seule montre au monde qui sonnait sous l'eau doit beaucoup aux exploits d'un homme hors du commun, Hannes Keller. Ce Zurichois est passionné par la plongée : au service militaire, un camarade avait révélé au jeune Keller les beautés de la vie sous-marine. Un manuel pratique de plongée lui apprend qu'un savant suédois prétend qu’on peut plonger en simple habit d'homme-grenouille à des profondeurs réputées dangereuses et accessible seulement en lourd scaphandre.
La plongée sous-marine n'avait à priori rien à voir avec Vulcain. Sans accès à la mer, la Suisse est riche en pionniers des découvertes maritimes : pensons à Jacques Piccard (avec Rolex) et ses explorations des profondes fosses des Mariannes et aux victoires, plus récentes, des « marins d'eau douce » helvètes dans les courses hauturières ou la régate la plus prestigieuse du monde. En 1959, les exploits répétés d'Hannes Keller sont parvenus aux oreilles des dirigeants de Vulcain. Ils décident alors de mettre au point sur ses conseils une montre indiquant précisément les paliers de décompression : qui deviendra la célèbre Nautical.

Lors de sa première tentative d’atteindre 155 mètres de profondeur dans le Lac Majeur, avec un mélange révolutionnaire de gaz –calculé par un professeur de l’EPFZ– et des temps de décompression fortement raccourcis, Keller n’attire pas les foules : seul, un journaliste du jeune quotidien Blick y assiste. Mais la nouvelle fait le tour du monde : plus de 500 articles de presse le mentionnent, les actualités cinématographiques rendent immédiatement le plongeur célèbre.
Keller battra ensuite son propre record vers l’île de Catalina, au large de Los Angeles. Il avait dû se rendre aux USA, car la marine américaine refusait de croire que pareil exploit était réalisable. Le 2 décembre 1962, il descendit donc à 315 mètres, distance clé : c’est la profondeur moyenne des bas fonds autour des terres émergées, ou plateaux continentaux. Il ouvrait ainsi une surface de plusieurs millions de kilomètres carrés à l’exploration sous-marine, minière et pétrolière surtout. Ce fut une réussite extraordinaire pour Vulcain que d’avoir Keller comme porte-drapeau.
Qui mieux que le modèle Cricket Nautical pouvait servir le renouveau de Vulcain ? Emblème de la marque, indispensable pour établir un lien entre le passé et le présent, mais parfaitement contemporaine tant par ses dimensions que par son esthétique, la Cricket Nautical est rééditée dès 2002. Equipée du calibre Cricket V-10, cette exacte réédition du modèle plongeur Vulcain lancé en 1961 se caractérise notamment par son boîtier à triple fond, son cadran à deux niveaux indiquant les tabelles de décompression, son alarme audible sous l’eau et son étanchéité à 300 mètres.
Si un bracelet en caoutchouc moderne remplace le bracelet d’époque, Vulcain propose également la Cricket Nautical dans un prestigieux coffret en bois laqué comprenant un bracelet en cuir et un autre en acier, ainsi que tous les outils nécessaires à en changer.
Spécificités techniques de la Vulcain Cricket Nautical réédition du modèle fabriqué en 1961
Diamètre 42.00 mm – Longueur 51.00 mm - Hauteur 17.40 mm
Cadran anthracite
Triple fond de boîtier servant de chambre de résonance et garantissant l’étanchéité à 300 mètres.
Mouvement réveil Vulcain Manufacture à double barillet avec indications Heure, Minute, Seconde, Réveil. Cadran tournant activé par une couronne débrayable située à 4 heures et permettant la lecture des tabelles de décompression.
Calibre : Vulcain Cricket No V10 – réveil mécanique 12’’
Fréquence : 18'000 alternances/heure
Rubis : 17
Glace : Hésalite
Etanchéité : 300 mètres
Bracelet : Caoutchouc noir et alligator anthracite couture rouge de Louisiane ou bracelet acier
Dimensions bracelet : 22/18 mm
Boucle : acier déployante à poussoir de sécurité
Edition limitée à 209 pièces
Ref : 100107.026LF